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En mémoire de père Gérard Wehrlé

Homélie de Francis Brignon, prêtre coopérateur et ami de Gérard

à l’occasion des funérailles célébrées le 6 juin 2020  en l’église saint Barthélémy à Mulhouse

« Moi, Dieu ton Père, de même que Jésus, mon Fils, ainsi que l’Esprit Saint, je ne t’oublierai pas ! » Oui, Gérard, « vois, combien je t’ai gravé sur les paumes de mes mains. » (Isaïe 49,16)

Maintenant que tu viens d’atteindre l’ultime bout du monde – le ciel -, toi qui me manifestais tant ta passion des bouts du monde de notre terre, confiés à nos responsabilités écologiques, tu nous rappelles aujourd’hui, aux côtés du Seigneur, que tous nous sommes appelés à vivre ! Car tous, comme toi, Dieu nous appelle à vivre et à donner de vivre au service les uns des autres.

Tu as, Gérard, répondu à un appel intérieur à choisir dans l’exercice d’une liberté éclairée, ce qui rend plus vivant. Pour toi, le Dieu de Jésus Christ ! La Trinité ! Jésus, avant même ta libre décision, t’aura choisi en premier pour t’inviter à le suivre, pour vivre comme son disciple et serviteur. Et, comme toi, nous aussi ici rassemblés, Jésus a choisi de nous appeler ses amis ! Car, tout ce que Jésus a appris de son Père, il nous l’a fait connaitre !

Gratitude, confiance, courage et joie ! Quatre attitudes ! Deux pour nous maintenir debout sur nos deux pieds ! Deux autres pour tendre nos mains aux autres, les regarder et les inviter à regarder ensemble notre avenir commun ! Et, bien sûr, le construire avec les énergies de l’Esprit Saint : l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la fidélité, la douceur et la maitrise de soi !

Gérard, fort de ta personnalité éprise de simplicité, de jovialité, d’humour et fort d’une foi vigoureuse et contagieuse, tu te seras employé, au gré de tes divers ministères pastoraux, 57 années durant, à rayonner et semer dans bien des cœurs le trésor de l’évangile. Sois en remercié ! Trésor que, comme tout un chacun, baptisé, fille et fils de Dieu, nous portons comme dans des vases d’argile. Bref, conscients de notre être vulnérable et pécheur !

Gratitude

Oui, avant tout et à ton exemple, puissions-nous, tel le cierge pascal placé devant ton cercueil, rayonner la lumière de notre joie de croire ! Depuis que j’ai pris connaissance de ton départ de ce monde vers le Père qui t’a tendu ses bras pour t’accueillir, Gérard, j’ai glané, grâce au téléphone ou de vive voix, confrères et laïcs qui t’ont connu ou fréquenté. Et, sans verser dans quelque flatterie que tu n’apprécierais pas du tout, ensemble réunis ici à St Barthélémy, je tiens toutefois fermement à t’offrir notre propre action de grâce sous forme d’un bouquet de fleurs des qualités, dont les uns et les autres m’ont témoignées : bonne humeur, ouverture d’esprit, toujours en recherche, liberté d’esprit, bienveillance, sourire, optimisme, joie de vivre, ton côté enfant devant ta belle crèche, ta jovialité, ton humour, ta fraternité sacerdotale, ta fidélité en amitié, ta franchise, ton témoignage contagieux, ta disponibilité, ton humanité dans tes réflexions, ton souci de comprendre les gens, tes pieds sur terre et ta sureté théologique, ta confiance …

Un gros bouquet où rares étaient les épines ! Certes, elles existaient, tels ces piques passagers d’orgueil, propres, selon l’une de tes amis, au caractère du signe des « jumeaux » … Nul n’est parfait, disions-nous par la suite ! …

Gérard, aux dires de cette même amie d’enfance, tu as éprouvé et vécu un amour lucide et profond pour l’Eglise. Avec tes confrères de classe d’ordination tu m’as plusieurs fois rappelé que vous vous êtes trouvés place St Pierre à Rome le jour du début du Concile Vatican II, le 11 octobre 1962. Que Monseigneur Weber et Monseigneur Elchinger vous ont salué depuis leur procession d’entrée dans la basilique ! Concile Vatican II, véritable bouffée d’air frais que tu auras eu grande joie de vivre durant tout ton sacerdoce !

En témoignent, là aussi, maintes confidences reçues ces jours derniers ! Tu prêchais avec les yeux et tout ton cœur ! Dans tes homélies, la parole passait ! Homélies agrémentées par la Parole de Dieu, par tes attentions à l’actualité et par la sève de ton humour … Elles étaient à la portée de tout le monde. Et quand je t’invitais chez moi autour d’un bon « jus de pomme » ( – pour les non connaisseurs : un beau whisky ! -) et d’un bon repas, tu aimais à me partager ton art de commencer tes homélies par une judicieuse « captatio benevolentiae » … Autrement dit, pour ceux qui ne seraient pas férus de latin : l’art de captiver la bienveillance et l’attention des fidèles !

Confiance

Oui, la gratitude qui surgit d’un cœur humble engendre la confiance. Reste que la confiance sans oser porter la croix d’une mission passionnante quoiqu’exigeante, ça ne coule pas de source. Hier déjà, Pierre, Judas et bien d’autres, dont nous sommes aujourd’hui encore, ont déserté aux heures décisives et de vérité. Ce que Jésus a dit aux apôtres, il nous le met à cœur à chacun de nous ici présents ou présents par la pensée ou la prière. « Demeurez dans mon amour ! Si vous êtes fidèles à mes commandements, vous demeurerez dans mon amour. »

Gérard – j’en ai l’intime conviction ! – tu ne cesseras pas de nous encourager les uns et les autres – et particulièrement nous, tes confrères dans le sacerdoce – de ne jamais oublier combien Jésus nous choisit, nous met à la place où nous sommes aujourd’hui pour que nous repartions, tout à l’heure, que nous donnions du fruit et que notre fruit demeure.

A ton exemple, demeurons fidèles au Concile Vatican II, épris de solidarité. Toujours mieux encore décidés à nous rendre proches des femmes et des hommes de notre temps. Toi, tu t’y es employé ! (Et, entre parenthèse, j’en témoigne aussi auprès des membres de ta famille de sang ! Tonton « Ding, Dong », comme ils aimaient à t’appeler !)

A ton exemple, Gérard, gardons à cœur que c’est ensemble, en Eglise, que nous sommes appelés à annoncer, à semer et à vivre l’Evangile du Christ ! A offrir avant tout l’hospitalité de tout notre être à Jésus, le Christ, mort et ressuscité ! A être, à son invitation pressante, sel et lumière de la terre !

Courage et joie

Gratitude et confiance engendrent en nous courage et joie. Gérard, tu aimais la personnalité de Jean le Baptiste. Moi aussi ! Osons convier nos contemporains à nous accompagner au désert pour y prendre soin de notre intériorité. Y apprendre à lutter contre les tentations de l’avoir, du savoir et du pouvoir. Mais surtout pour oser nous rendre comme Jésus jusqu’aux périphéries existentielles actuelles et à venir ! Y exercer le nécessaire apostolat de l’oreille : écouter avant de parler ! Y favoriser une Eglise synodale : une Eglise « en sortie », décentrée d’elle-même ! Y aller à la rencontre des jeunes pour avec eux transmettre notre enthousiasme pour une Eglise qui ne cesse de chercher la source en vue de mieux répondre à l’immense soif de nos contemporains en quête d’une eau vive !

Comme Jésus avec les disciples d’Emmaüs, osons écouter et voir avec empathie ! … Car, tous nous sommes en appétit de dialoguer, de partager. Osons ce style du chemin d’Emmaüs qui fait de notre accompagnement un style d’être Eglise qui prend racine dans la pratique eucharistique qui nous unit maintenant ! N’oublions jamais qu’un « compagnon » est celui avec qui l’on partage le pain !

L’après pandémie s’ouvre à nous comme un nouvel horizon missionnaire où, en Eglise, nous nous devons, en conscience et avec joie, d’être des baptisés enthousiastes, responsables de nos charismes de prophètes décidés à annoncer en paroles et surtout en actes, l’espérance de Dieu, notre Père qui jamais ne nous décevra !

Oui, sœurs et frères, sans doute tristes comme les apôtres et comme eux tentés de rester là à regarder le ciel, puissiez-vous entendre ces hommes en vêtements blancs devant vous – Christian notre évêque auxiliaire, les prêtres et les diacres – vous interpeler et vous dire que ce « Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel » (Actes 1, 1-11)

De même, de Gérard qui sera à ses côtés pour nous accueillir au jour de la Parousie ! Et dans l’espoir que, comme chez Gérard dans ses homélies la parole passait, je traduis volontiers ce mot de « Parousie » par ce qu’il signifie : « présence ». Un mot qui en est venu à être utilisé pour désigner la venue du Christ ; et spécialement sa venue définitive ! Sans oublier que Dieu seul en connait l’heure et le moment !

Laissons-nous donc maintenant, dans un temps de recueillement, imprégner par la gratitude, la confiance, le courage et la joie ! Et ce, pour en demeurer les ardents témoins jour après jour auprès et au service de tous ceux que notre vie nous offre de rencontrer !

Amen !